La nuit tous les chats sont gris. (PV Emily) - Terminé

Il était neuf heures du soir et nous étions un vendredi. Dernier jour de la semaine pour les étudiants de Paradize. Et après cette longue et dure semaine de cours, Ever était bien heureuse d’être rentrée chez elle. Au calme, dans sa chambre avec en fond sonore une douce musique apaisante, la jeune femme rangeait ses affaires de cours sur son bureau, afin d’y voir plus clair dimanche soir. Mais ce soir, à priori, elle n’avait rien de prévu hormis un bon film à l’eau de rose et une pizza qui l’attendait dans le frigo familiale.

Depuis quelques semaines voir quelques mois, à Paradize, les jeunes ne sortaient plus que très rarement et encore moins si ils étaient seuls. En effet, il se passait de drôle de choses ces temps-ci. Des murmures et des rumeurs courraient les rues désertées. Seul le lycée était exempté de ces étranges faits… mais ne dit-on pas que c’est au lycée que tout commence ? Allez donc savoir…

Après avoir enfilé un gros pull en laine sur son legging afin de se protéger de dents cruelles du froid, Ever descendit dans son salon aux tons couleurs bordeaux. Sa mère n’était pas encore rentrée de son soi-disant travail, et la jeune brune doutait que ce ne serait pas le cas ce soir-là. Tant mieux se dit-elle, un peu de tranquillité ne faisait jamais de mal. Et une soirée sans sa très chère mère la réjouissait plus qu’elle n’osait l’admettre.

Dehors le temps se gâtait et les nuages arrivaient en masse sur la petite ville de Paradize. Son ventre se mit à gargouiller sévèrement. Ever se dirigea donc vers la somptueuse cuisine. Oh oui, vraiment somptueuse. Au dessus de nous, un gigantesque lustre de cristal blanc éclairait toute la pièce d’une douce chaleur blanche. Contre un des murs de la pièce, un frigo typiquement américain trônait debout captivant l’attention des visiteurs par sa masse imposante mais non choquante. Des dizaines de mètres carrés étaient mis de façon à servir de plans de travail. Oui, la maman d’Ever aimait la cuisine. Tout le contraire de sa progéniture. Au beau milieu de la cuisine, se trouvait une table haute accompagnée de tabourets pour accueillir la mère et sa fille quand le destin les faisait se croiser un matin ou un midi. Ensuite, un bar américain faisait office de passe-plats entre le living et cette pièce. Pour finir, la cuisine entière était dans les tons chauds et doux, mélangée de dorée, blanc, brun et orangé. Un beau et tendre tableau de couleurs.

La petite Ever se dirigea vers le frigo et ouvrit celui-ci. Et tandis qu’elle prenait la pizza surgelée, seule pizza qu’elle acceptait d’avaler, une sonnerie retentit et perça le silence qui englobait la maison, tel un présage d’horreur. L’adolescente de seize ans sursauta et faillit lâcher le plat qu’elle tenait entre ses mains fragiles. Déposant celui-ci sur la table à manger, elle se précipita au salon où elle avait laissé son portable. Sur l’écran lumineux de l’appareil, était inscrit qu’un nouveau message venait d’arriver. Ever l’ouvrit.
De : Inconnu
À : 21h17, le 3/11
Sujet : Je t’attendrai au bar de la ville.
Sois gentille, ne me fais pas attendre Ever.

Et c’était tout. La dite Ever haussa un de ses sourcils. Qui ça pouvait bien être ? Elle qui ne donnait jamais son numéro de portable à des inconnus, quelqu’un l’avait trouvé. Malgré sa petite taille et son enfance élevée dans la soie, Ever avait du courage et surtout, elle était téméraire.

C’est pourquoi, malheureusement, sa curiosité l’emporta sur son bon sens et la jeune fille brune se retrouva dans sa chambre aux couleurs vertes pommes à enfiler sa veste brune et ses bottes de la même teinte. Elle mit ses clefs, portable, portefeuille et lunette dans son sac et sortit de chez elle. Rapidement, et presqu’en courant, Ever se mit en marche vers le centre-ville, qui n’était qu’à dix minutes à pieds de chez elle. Oui, Paradize était une petite ville. Sur le chemin, elle réfléchit à qui ça pouvait bien être, mais rien ne lui vint à l’esprit.

Une dizaine de minutes plus tard, elle se trouva devant la porte du bar où elle travaillait chaque mercredi et samedi soirs. Mais nous n’étions ni l’un ni l’autre. Puisqu’elle ne savait pas trop à qui elle avait à faire, elle mit ses lunettes opaques et poussa la porte du bar.

Des vieux, des jeunes, des hommes, des femmes étaient attablés un peu partout. Seul ou en groupe sirotant une boisson alcoolisée. Ici, les limites d’âges n’avaient pas lieu d’être. Et c’est cela qui rendait sans doute le bar un peu effrayant. Ever partit s’asseoir dans un des coins de la salle, observant les visages. Rien. Elle ne trouvait rien. Bizarre tout ça. Une petite serveuse vient prendre sa commande. Un jus d’ananas s’il vous plait. Maligne ou pas, la jeune fille dit son nom haut et fort. « EVER ! » Et regarda autour d’elle voir si quelqu’un sembla tiquer à l’entende de son nom. Rien.

Une quinzaine de minutes passèrent. Bien, Ever se rendit à l’évidence, on s’était joué d’elle. On s’était moqué. De rage elle planta ses ongles dans la paume de sa main où gouttèrent quelques gouttes de sang. Oh non, Ever n’aimait pas du tout que l’on se foute, ouvertement ou pas, d’elle. Susceptible ? Mais non, où allez vous chercher cela ?!

Il était maintenant dix heures, et la jeune femme n’avait aucune envie de sortir. Elle préféra rester là, à boire. Une bière cette fois-ci. Les gens entraient et sortaient. Personne ne faisait attention à elle.

Mes fiches d'inscription en main, je gravis les marches qui menait à une petite maison assez vieille mais en bon état... ma maison. Et contrairement à bon nombre d'adolescent, cette expression n'était pas à prendre au figuré : à 16 ans j'avais déjà ma maison et j'y vivais seul avec mon petit-frère, Mickael. Bon, n'exagérons rien, je n'étais pas livrer à moi-même dans ce monde cruel, j'avais la surveillance d'un adulte. Enfin, si on peut appeler JJ, de son vrai nom Janet Jones, une adulte. JJ, c'est ma tante. Jeune femme complètement irresponsable qui s'était vu attribué deux enfants à la mort de leur mère et qui ne s'était pas gêné de les envoyés à des milliers de kilomètres de chez elle dans une ville complètement paumé de l'Ohio. Oh, n'ayez pas pitié de nous. J'ai tout de suite approuvé la décision de ma tante. Je ne voyais pas Mickael grandir dans ce taudis pourri qui nous a servi de maison pendant 3 ans, jamais propre et toujours grouillant d'hommes.

Enfin, bref. J'entrais silencieusement dans la maison pour ne pas réveiller Mickael. Il était 9H30 et il était censés déjà être au lit. Je dis bien censés. Une lumière provenant du salon me fit soupirer et je me remémorais les vieux sermons de ma mère sur l'heure du coucher en avançant quand je vis qui était dans le salon. Janet Jones, affalé sur le canpé une bouteille de vodka sur la table basse. Un ronflement s'échappait de sa bouche ainsi qu'un filet de bave... Je l'avoue, ce que je fis après étais tout sauf responsable. Je sortis presque en courant de chez moi et commença à marcher vers le centre-ville. J'avais complètement oublié qu'elle venais aujourd'hui comme tous les vendredis, une fois sur deux. C'était à cette seule condition que le tribunal nous avait accordé ma venue à Paradise. Le problème, c'est que je me prépare toujours un peu avant sa venue et là je ne l'étais pas du tout, prête.

J'essayais donc de repousser encore de quelques heures nos retrouvailles. Je marchais donc dans les rues de la ville avant d'apercevoir des lumières plus fortes. J'étais visiblement arrivé dans le centre-ville qui n'avais de nom que sa position géographique. Un petit centre commerciale y trônait, fermé pour la nuit, ainsi qu'un bar miteux qui servait apparemment aussi d'unique restaurant de la ville. Je me dirigeais vers celui-ci. Qui sait ? Peut-être que je rencontrerais un ado aussi paumé que moi qui me servira d'ami et de couverture pour l'année à venir. Je poussais la porte en chêne et me retrouvait entouré de gens différents, du plus vieux bonhomme à l'homme d'affaires, tous bavardait des quatre coins de la salle, comme s'ils se connaissaient depuis 30 ans. Que suis-je bête ! Ils se connaissent probablement depuis qu'ils sont nés dans un trou comme celui-là...

Je m'accoudais au bar et entrepris d'accomplir ma mission. Peine perdue. Je ne voyais aucun ado seul. Soudain, une voie de fille cria "EVER !". Elle provenait d'un coin de la salle, d'une fille brune, plus exactement, d'à peu près mon âge et qui cherchait visiblement quelqu'un mais personne ne vint. Bizarre. Je décidais tout de même que ce serait elle mon "amie". Je m'approchais et lui demanda, en prenant un petit air timide qu'avait normalement tout les jeunes dans ma situation :

- Euh, salut. Je m'appelle Emily... je suis nouvelle.

Souvent, boire est le meilleur des remèdes. Mais quand on a presque dix-sept ans, faut-il vraiment boire à n’en plus savoir pour oublier des problèmes que dans quelques années vous n’en auriez même plus un simple souvenir ? Non. Mais nous vivions dans une époque où seule la tendance dicte votre vie. Et si on vous disait que boire c’était cool, ça l’était. Et pourtant, Ever n’était pas une jeune fille influençable. Elle aimait avoir ses propres réflexions, ses propres choix. Mais quand l’étouffement vous prend, quand vous avez trop longtemps souris, c’est parfois dur d’accepter un choc aussi lourd. Et pourtant, la jeune brune avait tout pour être heureuse. Sauf l’amour de sa mère.

Elle regardait d’un œil vide les gens entrer et sortir. Toujours aucun signe de son inconnu. D’autres minutes passèrent, et Ever se rendit à l’évidence, que ce ne pouvait qu’être une blague. Ou tout du moins, elle l’espérait vraiment. Se calant un peu plus sur sa chaise et repoussant son verre vide, elle se mit à réfléchir. Enfin, si on pouvait appeler cela comme ça. Parce que oui, depuis quelque temps à Paradize, il se passait des phénomènes pour le moins étranges. Des sensations d’étouffement ou comme si quelqu’un vous surveillait pas derrière. Et en écoutant d’une oreille discrète les jeunes étudiants de son lycée, elle n’était pas la seule à s’en être rendu compte. Bon. Raison de plus pour ouvrir l’œil.

Ever essayait le plus de temps possible de rester loin de chez elle. Plutôt dehors, qu’enfermer dans sa maison avec sa mère tellement joviale. Mais voilà, trainer dans les rues sans rien faire, ce n’était pas dans le domaine de la jeune fille. Elle avait donc décidé de se trouver de petits boulots dans le quartier. Et à ce jour, elle en avait déniché deux. Son premier, où c’était la deuxième année qu’elle l’entamait, était d’être serveuse le mercredi et samedi soir dans le petit bar de Paradize. En outre, celui dans lequel Ever consommait à l’instant précis. Son autre job, si on pouvait appeler ça comme ça, était « rédactrice en chef d’un journal ». Mais pas n’importe lequel. En effet, elle avait, après maintes demandes, accéder à ce poste dans son lycée. Car son école fournissait un journal quotidiennement et qui relatait les petites nouvelles du lycée et des environs de Paradize. Très in, très jeune.

Et Ever adorait ça. Elle était la petite souris allant chercher informations importante ou pas derrière un mur, sous un banc, écoutant chaque étudiant du lycée parler à tel ou tel camarade. Des anecdotes, il y en avait ! Et plus que ça même. Ever avait commencé à la rentrée scolaire, ce qui voulait dire qu’elle écrivait depuis seulement deux petits mois. Ce qui n’était pas grand-chose, il faut l’admettre. Mais elle s’en donnait à cœur joie ! N’était-ce pas le plus important ? Et tandis que la jeune étudiante était doucement perdue dans ses pensées, elle ne vit pas s’approcher d’elle une autre jeune fille aux cheveux couleurs miel sucré.

- Euh, salut. Je m'appelle Emily... je suis nouvelle.

Ever releva sa tête, qu’elle n’avait pas souvenir d’avoir baissé. Elle avait quelque peu été surprise d’entendre une voix à deux mètres tout au plus, d’elle. Un instant la jeune brune avait espéré que ce soit son inconnu. Mais maintenant, le visage de la voix en face de ses yeux, elle en doutait fort.

- Hi. Moi c’est Ever.

Elle avait conscience que s’appeler Ever pouvait paraître bizarre à première vue. Tant pis. Alors comme ça la jeune Emily était nouvelle dans cette petite ville qu’était Paradize.

- Je t’en prie, assied toi, je ne vais pas te manger. La jeune Ever lui fit un petit sourire. Autant paraître sympathique. Car elle savait combien être nouvelle pouvait être dur dans une ville sans attachement ni connaissance.

- Tu viens d’où ?

Je n'ai jamais été très bavarde, ce qui n'avait pas l'air d'être une bonne qualité pour vivre dans une ville comme Paradize. Ici, on avait plutôt l'air d'être dans un Facebook géant ouvert à tous. Tout le monde sait qui tu est et ce que tu fais à chaque seconde de ta vie. Je suis sure qu'ici, si une femme à un enfant hors mariage, ce serait un scandale gigantesque. On se demanderais qui est le père, comment et où ça c'est produit. Ça ne m'étonnerais pas si ça finissait en couverture du journal local. Sans rire. Enfin. Je m'approchais de la fille qui me sourit en disant d'un air jovial :

- Hi. Moi c'est Ever.

Bon. Surtout ne pas rire. Ça serait très mal perçu et je serais partit dans le jeu des réputations dès mon premier jour. Or, je préférais avoir aucune réputation qu'une mauvaise. Etre invisible, c'était, à mon plus grand soulagement, ma meilleure qualité. Mais, il faut avouer que Ever, ce n'était pas du tout un prénom qui collait à une ville comme Paradize... C'était trop... exotique ?! Je me demande à quelle sorte de moquerie elle avait du se confronter ou si elle était une de ces filles populaires du lycées. Peut-être même une cheerleaders ? Pitié que non...

- Je t’en prie, assied toi, je ne vais pas te manger.

Typique de la fille trop sympathique. Je m'assis quand même, ça aurait été bizarre de rester planté là surtout que je n'avais pas trop confiance en ces gens qui me tournaient autour. Ever me fit un petit sourire encourageant, du genre "T'inquiètes pas, ma petite ! Tout va bien se passer. Tu vas te faire plein d'amis et ta vie va ressembler à un conte de fée !" Encore un peu et on se serait cru dans le pays des bisounours... Vous pensez surement que je suis cruel et que cette pauvre Ever est une très gentille fille, que je me trompe sur son compte et blablabla. Oui surement. Mais, les gens sont cruels et encore plus les jeunes de mon âge. Ever est surement une fille de Paradize, qui a eu une magnifique vie rempli d'amour et de bonheur toujours entouré de sa bande de copines qu'elle connait depuis la maternelle. Alors pourquoi serait-elle méchante si elle a tout ce qu'elle voulait... Je fus alors interrompu par une question à laquelle je ne m'attendais pas mais alors pas du tout... Pfff...

- Tu viens d'où ?

Ça commençait dès la première minute. J'avais battu mon record. Je n'hésitais pas sur ce coup et décida en une demi-seconde de lui dire la vérité. En partie.

- Je viens de San Fransisco.Et je précisais au cas où elle ne saurait pas où ça se trouvait. En Californie.

Je laissais passer quelques secondes et lui demanda pour donner le change.

- Et toi ? Tu as toujours vécu à Paradize ?

[HJ : J'ai changé de narrateur, parce qu'enfaie la troisième personne ne me va pas du tout Razz

]

La jeune fille dénommée Emily semblait quelque peu réticente… Ou était-ce mon imagination ? En tout cas, j’avais vraiment l’impression de ne pas lui faire bonne figure… Bah, tant pis, en ce moment là, ce n’était pas ce qui m’importait le plus.

- Je viens de San Francisco. En Californie.

Oh, Californie… Une ville que j’avais toujours eue envie de visiter. Petite j’avais supplié ma mère d’y habiter, puisqu’on devait quand même déménager et que bon, niveau argent ça allait bien de ce côté-là. Mais non, elle avait plutôt décidé de venir s’installer dans un coin paumé des Etats-Unis, pas du tout connu et encore moins viable. Pfff. Etant donné qu’elle était toujours en déplacement dans le pays, ça n’aurait rien changé pour madame d’aller vivre en Californie plutôt qu’à Paradize… Paradis, ouais, et mon chien sait voler.

- Et toi ? Tu as toujours vécu à Paradize ?

Heureusement que non. Pas que je n’aimais pas cette ville… Non, c’était… Je ne sais pas, elle n’était pas nette. Des choses bizarres s’y passaient.

- Oh non. Jusqu’à mes dix ans, j’ai vécu dans l’état de Washington. Et pour des raisons… familiales, ça fait donc six ans je vis ici. C’est beau, mais petit. T’en auras vite fait le tour.

Ouais. Non, je n’avais vraiment pas envie de retourner fouiller dans mon passé. Un, je n’avais plus que de très vagues souvenirs. Deux, c’était peine perdue, j’avais fermé mon esprit niveau famille.

Alors qu’un long silence quelque peu pénible s’installait, je vis la porte du bar s’ouvrir lentement. Et se refermer d’un coup sec. Euuuh, ouais, voilà de quoi je parlais, la vie à Paradize était étrange. Je ne m’inquiétais pas outre mesure, j’avais prit l’habitude maintenant… Sauf quand ça se passait dans ma maison, là vraiment ça n’allait pas.

- Dis, ça va peut-être te paraître bizarre, mais en arrivant tu n’aurais pas vu un… enfin quelqu’un qui semblait attendre… quelque chose ?

Parce qu’en y réfléchissant, ce message que j’avais reçu quelques heures plus tôt me foutait un peu les boules. Si ça se trouve on en voulait à ma vie… Ou on voulait des informations classées secrètes et on allait m’employer contre ma volonté… Ever, reprend toi. Tu es une simple jeune fille, avec un peu trop d’imagination, certes, mais tu te fais des films. Après tout, qui voudrait du mal à une lycéenne de seize ans dans une ville pourrie ? Personne.

Mais étant donné que j’avais trop de curiosité, j’avais tout de même envie d’élucider ce message. Même si j’aboutissais à une farce digne d’un mec de ma classe. Tous pareils à cet âge. Et puis ça me divertirait de ma vie un peu trop calme et paisible.

[HJ : Oui moi aussi je m'y suis mit dès mon 3e RP lol!

]

Quand j'évoquais la Californie, Ever prit une expression rêveuse qui n'échappais à personne. En effet comment ne pas rêver d'y habiter ? La pauvre, elle n'as pas du avoir beaucoup de chance pour naître dans une coin pareil, dépourvu de tout divertissement, si ce n'est un pauvre "centre commercial" ainsi qu'un bar. Celui-ci devenait de plus en plus effrayant d'ailleurs. J'avais l'impression qu'un projecteur était braqué sur moi et que tout le monde dans la pièce me dévisageait. Certains avaient une expression bizarre, et bien qu'ils avaient l'air humain, il y avait dans leur regard quelque chose de... bestial ?! Non, je me faisais des idées ! Evidemment ! Même un monstre ne serait pas assez fou pour venir dans une ville comme Paradize. Si j'étais un monstre, je serais plutôt aller dans une grande ville pour faire le plus de dégâts possibles...

Quand je posais ma deuxième question, le visage de la fille prit soudain une expression beaucoup moins aimable que la première... Et beaucoup plus étrange... Comme de la peur. Non, je me faisais des idées. Ou alors elle avait peut-être peur de ma réaction. Non décidément, ce n'était pas ce genre de peur. Elle me faisait plutôt l'effet d'une bête traqué. Mes pensées de tout à l'heure me revinrent en mémoire. Une boule se forma dans mon ventre. Idiote. La réponse de Ever me força à revenir à la réalité :

- Oh non. Jusqu’à mes dix ans, j’ai vécu dans l’état de Washington. Et pour des raisons… familiales, ça fait donc six ans je vis ici. C’est beau, mais petit. T’en auras vite fait le tour.

Tiens, alors elle ne vient pas d'ici. Ceci explique cela. Entre autre son prénom peut commun. Et si je faisais bien le compte, elle avait 16 ans, comme moi. On aura peut-être quelque cours ensemble, et je ne me retrouverais pas totalement seul. J'avais, par expérience, appris très vite que quand on est accompagné d'une personne du même sexe, on attirait beaucoup moins l'attention. Certains aurait trop peur de m'approcher, sentiment qu'il n'aurait pas eu si j'étais seul, vulnérable. Enfin, je supputais trop vite. Je m'étais trompé sur Ever, j’espérais que ce serait aussi le cas pour le lycée... En tout cas, elle avait raison sur un point. Paradize était une belle ville fleurie avec son joli (et petit) parc, il me fallait en convenir. Je n'avais jamais vécu entourer d'autant de verdure, San Francisco étant une ville trop dynamique pour qu'il y ait de la place pour de la végétation.

- Dis, ça va peut-être te paraître bizarre, mais en arrivant tu n’aurais pas vu un… enfin quelqu’un qui semblait attendre… quelque chose ?

Ma réponse fusa automatiquement.

- Non, désolé. Je n'ais pas vraiment fait attention.

Son expression de bête traquée revint à la charge et je ne pus m'empêcher de frissonner. Sa question avait l'air somme toute banal, bien qu'elle est un peu bégayée, mais je perçut tout de même un sous-entendue. Était-elle fille d'un riche politique et en tant que telle, poursuivit par des paparazzis. Non, ça ne tenait pas la route. Je tournais imperceptiblement la tête et revit le même couple de personnes avec l'expression bizarre. L'un surprit mon regard et me fixa. Je me retournais plus vite que la normal et sentis la chair de poule sur mon bras. Je tentais, en vain, de me persuader que j'avais froid. Mais, je n'arrivais pas à me sortir de la tête ses yeux noirs, vide et glacial.

- C'est moi, ou il y a des gens... bizarres ici.

Je commençais à vraiment penser que cette fille n'était pas folle. Non. C'est Paradize. La ville la plus paumé des Etats-Unis. Paradize...

- Non, désolé. Je n'ais pas vraiment fait attention.

Deviendrais-je à ce point paranoïaque ? En même temps, quand on habite seul la plupart du temps dans une énorme maison, il y a de quo avoir les jetons quelques fois. Mais quand même. C’était un message tellement… Bizarre. Enfin, si ça se trouve, ce n’était qu’un gars de mon lycée essayant de faire son malin devant ces potes. Et moi, comme une idiote, j’étais entrée dans son jeu, et là tout de suite, une bande de jeunes ados se foutaient ouvertement de ma tête. Génial…

- C'est moi, ou il y a des gens... bizarres ici.

Au moins je n’étais pas la seule à trouver Paradize étrange ! La plupart des gens de ma classe se moquaient de moi quand j’essayais de leur expliquer que je trouvais que certains éléments dans cette ville pouvaient paraître bizarres, mais rien à faire, personne n’avait jamais été d’accord avec ma théorie sur ça. Tant pis.

- Enfin quelqu’un qui est d’accord avec moi !

Je lui fis un grand sourire, aurais-je trouvé une jeune fille qui me comprendrait ? Disons que depuis mon arrivé, il y a de ça déjà six ans, je n’avais jamais vraiment accroché avec une personne en particulier, une ou deux amies, mais jamais très proche. Et bon, quand vous aviez seize ans, ça pouvait vous manquez. Souvent même. Mais je faisais abstraction, et je me concentrais sur le dessin. Chose dans laquelle j’excellais et que j’adorais. Ça me permettait de m’évader l’espace de quelques heures.

- C’est ce que je m’efforce de faire entendre aux autres. Il se passe vraiment des choses bizarres dans cette ville. Paradize n’est plus un havre de paix comme il l’était à mon arrivée.

Je pouvais paraître un peu folle dingue, mais c’est comme ça que je voyais les choses maintenant. Je me redressais sur ma chaise et m’étirais. Mon dos était tout engourdi d’être resté trop longtemps assis. Ouais, comme vous l’avez remarqué, rester dans la même position pendant des heures, très peu pour moi, vraiment.

Je jetais un œil à ma montre. Il était presque minuit ! Argh, si ma mère choisissait ce jour-là pour rentrer de New-York, j’étais cuite ! Parce que oui, madame ne me tenait jamais au courant du quand est-ce qu’elle rentrera ! Un vrai boulet… de canon. Ouais, je ne m’entendais pas du tout avec ma mère. Elle était plus une étrangère qu’autre chose. Je poussais un soupire, et me levais de ma chaise.

- Je crois que je vais rentrer, il est tard et ma mère n’est pas au courant que je ne suis pas à la maison, et la connaissant… Enfin, j’étale ma vie. Je laissais un petit silence s’installer, tout en lui tendant ma main. C’était un plaisir de te rencontrer. J’espère qu’on se reverra. Rentre bien !

Et tout en lui faisant un dernier signe de la main, je mis mon gsm dans ma poche et j’allai vers la porte. Marchant sans bruit autour des verres et des discussions de ces gens.

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